La matinée aurait pu être plus radieuse. Une bruine intermittente stagnait au-dessus de Beauxbâtons, entravant les entrains et les bonnes intentions des étudiants. Septembre allait bon train, et malgré tout, il semblait que l’automne atteignait déjà sa pleine force avant même que l’équinoxe ne soit consommé. Pour autant, il y avait bien un étudiant qui bravait le mauvais temps, recevant des minuscules particules de pluie sur le visage et le reste de son uniforme. Les cheveux en bataille, il fit une pause devant un étudiant plus jeune.
« Excuse-moi, est-ce que tu aurais vu la déléguée de l’eau ? »
« La déléguée de l’eau… »
« Oui, Hazel de Fontangues, si tu préfères. On m’a dit qu’elle avait reçu une tâche, et je dois lui parler. Est-ce que tu l’as vu ? »
« Eh bien, je… non ? »
« Merci et bonne journée. »

Roméo gardait son calme. Même énervé il faisait de son mieux pour rester courtois et aussi poli que cela lui était possible. Son esprit fulminait encore des mots inscrits sur la lettre fourrée dans son poing gauche, et il n’avait qu’une autre idée en tête, celle de rencontrer le sujet de cette missive et de… parler ? Crier ? S’invectiver ? Il n’avait pas vraiment idée de ce qu’il devait faire, dire ou même s’il était vraiment sage d’aller rencontrer sa future fiancée dans un tel état. Car c’était bien la nouvelle dérangeante qui avait achevée précipitamment son petit-déjeuner et provoqué la noyade de son livre de chevet lors de son départ précipité. Plus tard dans la journée, Roméo en aurait quelques regrets et passeraient quelques longues minutes à lancer plusieurs sorts afin de sécher et détacher l’ouvrage. Mais pour l’heure, il était tout concentré à trouver sa promise.

Passant la Fontaine des Flamel, il s’enfonçât dans les platebandes d’arbustes taillés en formes géométriques variées. Il avait parcouru le pré au pas de charge, et n’avait trouvé aucune âme. Ce qui n’était pas très surprenant vu le temps médiocre et, il lui semblait, le fait qu’aucune personne censée n’apprécierai être sur le chemin d’un noble furieux. Il ne tenait pas du Veaudelune, mais de loin, sous cette bruine, on pourrait hésiter.
Passant un bosquet somptueusement taillé en une forme de magie ancienne, il entendit des éclats de voix. Une nasillarde et une autre de jeune femme. C’était sa meilleure piste à ce stade, aussi Roméo se dirigea précipitamment vers l’origine des cris, commençant à percevoir quelques mots.
Ce n’était pas de jolis mots.

Finalement, alors qu’il débouchait dans une clairière, il l’aperçut. Une beauté blonde, qu’il avait côtoyé à de nombreuses reprises notamment durant les cours de danse. C’était sa partenaire habituelle de valse, c’était une personne qu’il appréciait. Peut-être jusqu’à aujourd’hui ? La discussion allait peut-être sceller quelque relation, mais ses inquiétudes et doutes furent extirpés de ses pensées par un floppée de jurons particulièrement velus.
« Butor, bélitre, gougnafière, hors de mon chemin vieille pleutre informe et purulente ! »

Ouvrant la bouche devant ce manque de retenu, il vit passer entre ses chevilles un éclair de poils blancs et noirs, avant de sentir une vive douleur au mollet droit. Remuant la jambe, la créature déguerpit alors qu’il sautillait, frottant la morsure à travers le tissu de son pantalon.
« Oh quelle saloperie, il m’a mordu ! Qu’est-ce que… c’est un chartier ? Qu’est-ce qu’il se passe ici ? »

Tout en essayant de calmer la douleur, il se tourna vers Hazel, qui se tenait devant lui, quelque peu en bataille. Pas étonnant qu’il ait autant eu du mal à la retrouver si elle était partie à la chasse au chartier, mais il n’allait pas reculer maintenant.
« Hazel, bonjour, je sais que ce n’est peut-être pas le bon moment mais il faudrait que l’on parle ? S'il te plaît ? »

Il était passablement évident que ce n’était pas le bon moment, mais les idées de Roméo l’avaient amené aussi loin, il n’allait pas faire demi-tour avec un bout de mollet mordillé.